Petite histoire d’un grand succès

Lorsqu’en décembre 2015, Alexandre Tari a annoncé à M. Éric Riendeau-Fontaine, enseignant de philosophie au Collège Jean-de-Brébeuf, qu’il prendrait part au concours pancollégial Philosopher, il lui a du même souffle déclaré qu’il comptait se classer au premier rang de ses finalistes. Déterminé à prouver qu’il en était capable, l’étudiant a travaillé d’arrache-pied pendant plusieurs mois pour atteindre son but. Le 17 novembre dernier, ses efforts ont été récompensés; à l’occasion de la remise des prix du concours, il a été sacré lauréat de l’édition 2016! Petite histoire d’un grand succès.

Créé en 1988 par M. Pierre Cohen-Bacrie, alors professeur de philosophie au Collège Montmorency, le concours Philosopher invite chaque année les étudiants de l’ensemble du réseau collégial québécois à rédiger une dissertation philosophique de 2 000 mots sur une question dont le thème varie d’une édition à l’autre.

L’année dernière, c’est le Collège de Valleyfield qui fut chargé d’orchestrer le concours. « La question était : “Quels jugements porter sur le capitalisme?” », indique M. Riendeau-Fontaine qui, en plus d’enseigner la philosophie à Brébeuf, est également le répondant local de l’activité depuis plus d’une décennie.

Lorsque ce dernier a abordé Alexandre pour lui suggérer de prendre part au concours, le jeune homme, qui était alors étudiant au programme Sciences, lettres et arts de Brébeuf, n’était pas tout à fait certain d’avoir envie de le faire.

« J’avais vu les affiches dans le Collège et le sujet m’intéressait, mais je ne pensais pas que j’aurais le temps », signale-t-il.

Il faut savoir que participer au Concours Philosopher n’est pas une mince tâche. L’exercice exige énormément de rigueur, de planification, d’implication et de patience.

« Le travail à faire dans le cadre du concours s’ajoute aux tâches régulières des étudiants, précise M. Riendeau-Fontaine. Les participants doivent faire beaucoup de lecture, rencontrer leur tuteur à quelques reprises et consacrer pas mal de temps à la rédaction de leur dissertation. […] Les textes doivent être déposés en mai, tout juste après la période d’examens. C’est sûr que c’est vraiment un défi important pour les étudiants. »

Aussi, s’il n’avait pas été encouragé par M. Riendeau-Fontaine, Alexandre ne se serait probablement jamais inscrit au concours. « Il m’a convaincu et quand j’ai décidé de le faire, je lui ai dit que j’allais gagner. Ça m’a motivé », confie-t-il, un sourire dans la voix.

Il s’ensuivit plusieurs semaines de travail acharné. « J’ai passé beaucoup de temps à la maison à lire différents auteurs et à assembler les morceaux de mon plan de texte. Je suis allé voir M. Riendeau-Fontaine plusieurs fois. J’ai aussi consulté d’autres professeurs pour avoir leurs points de vue sur mes différentes moutures. Chaque fois que j’avançais un peu, je les sondais pour voir si mes idées se tenaient. Tout ça m’a pris plusieurs mois », relate le jeune homme.

Récolter les fruits…

De toute évidence, ce travail colossal en a valu la chandelle, car avec sa dissertation intitulée Capitalisme : déconstruire son emprise pour reconstruire le sens, Alexandre est parvenu à épater le jury du concours.

Composé de nombreux enseignants de philosophie du collégial, le jury du concours a effectué trois tours de correction en se basant sur une grille d’analyse bien définie avant de faire son choix. Concrètement, cela signifie que des 125 participants au concours, c’est Alexandre qui est parvenu à marquer le plus de points.

« Alexandre a fait un travail remarquable, souligne M. Riendeau-Fontaine. Son texte est extrêmement riche. Il a cité plus de 28 auteurs et à la lecture de sa dissertation, on comprend bien qu’il les a lus et qu’il est parvenu à maîtriser leurs propos. Il s’est intéressé à des époques différentes; il a consulté des philosophes de diverses régions du monde; il s’est appuyé sur une documentation très diversifiée, etc. Tout ça mis ensemble lui a permis de se démarquer. En plus de sa maturité, c’est aussi son effort pour apporter des solutions concrètes aux diverses problématiques dénoncées qui en font un texte plus que pertinent.»

Une expérience à tenter

S’il concède que la victoire n’est pas à la portée de tous, Alexandre encourage fortement les étudiants qui valorisent la réflexion à s’inscrire au concours. À son avis, il s’agit d’une expérience largement formatrice.

« Ça vaut vraiment la peine d’y participer, soutient-il. Si on est intéressé par une question, c’est la meilleure manière de l’approfondir et de s’en faire une opinion plus éclairée! »

Abondant dans le même sens qu’Alexandre, M. Riendeau-Fontaine dit espérer que le succès de ce dernier saura inspirer d’autres jeunes et les motivera à prendre part au concours. « Il y a tellement d’étudiants-es qui n’osent pas, relève-t-il. Souvent, ce sont eux qui se limitent et c’est dommage. Ils pensent à tort que leur dissertation ne sera pas assez forte. Pourtant, c’est la deuxième fois en quatre ans qu’un étudiant de Brébeuf gagne la première place du concours. Et c’est la huitième année consécutive que des étudiants du Collège se classent parmi les finalistes! Mais de toute façon, même si leur dissertation n’était pas retenue par le jury, réfléchir philosophiquement autrement que dans la seule perspective des cours, exiger davantage de leurs professeurs et, surtout, parvenir à déposer un texte, à mon avis, c’est déjà une victoire. »

Édition 2017

Lancée en novembre dernier, l’édition 2017 du concours est maintenant ouverte. Cette année, c’est sur la question « La beauté sauvera-t-elle le monde? » que les participants devront se pencher. Bien que les inscriptions ne soient pas encore commencées, M. Riendeau-Fontaine invite tout de même les intéressés à entamer leur réflexion sur le sujet et à venir le trouver pour obtenir plus de détails. Un groupe de lectures se met déjà en branle à partir de l’Hippias majeur de Platon.

Pour en apprendre davantage sur le concours Philisopher.

Pour lire des extraits du texte d’Alexandre, c’est par ici.