Par Emilie Corriveau

Cofondateur de la compagnie Uvolt, Antony Diaz est l’un des jeunes entrepreneurs les plus en vue de Montréal. Déterminé à faire sa part pour changer le monde, cet étudiant de Brébeuf pourrait bien y parvenir grâce au chargeur de cellulaire écoénergétique qu’il a imaginé. Portrait d’un fonceur passionné!

Originaire de Barranquilla en Colombie, Antony est arrivé au Québec en décembre 2011. Bien qu’alors âgé de 16 ans, l’adolescent n’avait encore jamais vu de neige. Évidemment, comme il n’avait connu que le climat tropical de sa région natale – où la température ne passe pratiquement jamais sous la barre des 20 degrés – il s’attendait à vivre un certain dépaysement, mais il était loin de se douter que le changement serait aussi brutal.

« Deux jours après notre arrivée, il y a eu une grosse tempête. (…) Mais ce n’est pas le climat qui a été le plus dur! L’adaptation n’a pas été facile. Ma famille et moi ne parlions ni français ni anglais. En Colombie, nous avions une maison, une voiture, des emplois, des amis. Ici, nous n’avions rien; nous avons emménagé dans un appartement vide! Et contrairement à ce qu’on avait promis à mes parents avant de venir, ils n’ont pas obtenu de travail tout de suite à leur arrivée. Ça a donc été très dur, mais ça m’a beaucoup appris », confie-t-il.

Il faut savoir qu’avant qu’il n’émigre au Canada, l’avenir d’Antony semblait tout tracé. Particulièrement doué pour les mathématiques, le jeune homme se destinait à une brillante carrière dans le domaine et n’avait d’autre ambition que de gravir avec brio les échelons universitaires.

« J’avais eu la chance de représenter mon pays lors de concours internationaux de maths. De bonnes universités m’avaient proposé des bourses et j’avais décidé de devenir mathématicien. Il ne me restait que quelques mois de cours à l’école secondaire avant de commencer mes études universitaires. Mais ma famille a décidé de venir s’établir au Québec et j’ai fait le choix de la suivre ici », raconte le jeune homme.

Repartir à zéro

C’est donc sans diplômes en poche, mais bourré de potentiel qu’Antony s’est retrouvé à Montréal au beau milieu d’une année scolaire charnière. Puisqu’à l’époque, il était mineur et ne maîtrisait pas le français, il s’est diligemment joint à une classe d’accueil de l’École secondaire Saint-Henri. Décidé à terminer ses cours de francisation aussi rapidement que possible, il est parvenu à apprendre la langue en tout juste six mois!

« En plus de participer aux cours, j’écoutais plein de tutoriels en ligne. J’ai passé tout l’été à faire ça. Armé de mon fragnol, je me forçais à parler à tous les gens que je rencontrais pour me pratiquer. Ça m’a permis de m’améliorer beaucoup », explique-t-il.

Dès septembre, Antony a donc pu intégrer une classe normale de l’École secondaire Saint-Luc pour terminer ses études. C’est d’ailleurs dans l’un de ses cours qu’avec son ami James Manalad, il a eu l’idée de créer un chargeur de cellulaire fonctionnant à l’énergie thermique.

« Notre professeure de chimie parlait de thermoélectricité. Elle expliquait que la différence de température entre deux surfaces pouvait générer une différence de potentiel. Je me suis dit que ça pourrait être intéressant d’utiliser ce principe pour résoudre un problème de la vie quotidienne, mais je ne savais pas exactement lequel. Comme à ce moment-là, mon téléphone était toujours à plat, mon ami m’a fait remarquer que ça pourrait être un bon plan d’utiliser la théorie pour créer un chargeur de cellulaire », relate Antony en riant.

Certes, l’idée était ingénieuse, mais fort ambitieuse pour des adolescents! Aussi, lorsqu’Antony et son ami ont fait part de leur projet au professeur responsable de l’expo-sciences de leur école, celui-ci s’est montré plutôt sceptique, voire carrément incrédule. Loin de se laisser démonter, les comparses ont tout de même décidé de tenter l’expérience de leur côté.

« On a fait des recherches en ligne et on s’est mis à lire tout ce qui pouvait nous aider, rapporte Antony. On travaillait dans le garage de l’immeuble où j’habite. On faisait de la soudure, même si aucun de nous ne connaissait ça. »

Réaliser l’impossible

Contre toute attente, Antony et son ami sont parvenus à créer un prototype de chargeur écoénergétique fonctionnel et à mystifier tous ceux qui croyaient la chose impossible. Remarqués par l’astronaute Marc Garneau, qui était de passage à l’école Saint-Luc à l’occasion d’un concours scientifique, les acolytes ont été invités à participer à l’Expo-sciences Hydro-Québec où ils ont remporté le prix Énergie!

La suite est tout aussi heureuse: Antony et son collègue ont pris part à d’autres compétitions, se sont fait remarquer à nouveau, puis ont remporté différents prix.

« Les choses allaient très bien, mais j’ai dû trouver un nouveau partenaire parce que mon ami voulait se concentrer sur d’autres projets. Moi, j’avais envie de continuer, mais je savais que pour pouvoir faire profiter le monde de cette solution, il fallait entreprendre. Le problème, c’est que je ne connaissais rien à l’entrepreneuriat. Ce que je savais par contre, c’est que je voulais travailler avec quelqu’un qui partagerait ma vision. Parce que mon but, ce n’était pas de faire de l’argent – et ce n’est toujours pas le cas aujourd’hui – mais plutôt, d’instaurer un changement », précise le jeune scientifique.

Ce partenaire d’affaires, Antony a fini par le dénicher lors d’un évènement de la Jeune chambre de commerce de Montréal tenu à l’été 2015. Rapidement, l’inventeur du chargeur Uvolt a su qu’il avait trouvé une perle rare en Marc-Antoine Bonin, un ancien de Brébeuf maintenant étudiant en finances à l’Université McGill.

Ils ont donc conclu une entente et depuis, Antony a non seulement amélioré son prototype pour en faire un chargeur fonctionnant aux énergies cinétique, solaire et thermique, mais également, l’entreprise ne cesse de croître et de recruter de nouveaux collaborateurs. D’ailleurs, si tout se passe comme prévu, le chargeur Uvolt devrait bientôt être disponible sur le marché!

Sur les bancs d’école

En attendant, le jeune homme s’efforce de conjuguer intelligemment boulot et études. Car malgré son agenda professionnel chargé, il compte bien faire partie de la cohorte de diplômés de Brébeuf cette année!

« Quand je suis arrivé ici, je passais devant Brébeuf tous les jours. Je ne connaissais pas l’école, mais l’endroit m’impressionnait. Plusieurs fois, des gens m’ont dit que je ne pourrais jamais y aller, parce que c’était une école privée et qu’en plus d’avoir de bons résultats scolaires, il fallait être bon en français pour y être accepté. Ça n’a fait que me motiver encore plus. Quand ça a été le temps, j’ai posé ma candidature et j’ai été accepté! Je vais bientôt obtenir mon diplôme! »

La prochaine étape? « Je ne sais pas encore », répond Antony. Car s’il aime toujours les mathématiques, depuis son arrivée au Québec, le jeune homme s’est découvert des intérêts pour une foule de choses.

« Quel problème ai-je envie de résoudre maintenant? C’est la question que je me pose ces jours-ci. Lorsque j’aurai trouvé la réponse, je serai prêt à relever un nouveau défi! »

Le 18 février prochain, Antony Diaz et son partenaire d’affaires Marc-Antoine Bonin représenteront le Québec lors de la finale nationale canadienne du concours Global Student Entrepreneur Award. Ce concours international s’adresse spécifiquement aux étudiants entrepreneurs qui possèdent déjà une compagnie. De plus, Antony a été désigné comme l’un des présidents scientifiques de l’édition 2016 de l’Expo-sciences Hydro-Québec. Aux côtés de Marc Garneau, il jugera la finale régionale de Montréal qui aura lieu du 10 au 12 mars à l’École Saint-Luc.