Dans une campagne-choc, l’AGEB dénonce l’utilisation d’expressions dégradantes et discriminatoires.

« Les mots, comme les armes, partent parfois tout seuls », dit l’auteur Daniel Pennac. C’est pour sensibiliser les jeunes à cette réalité insidieuse que l’Association générale des étudiants de Brébeuf (AGEB) a lancé la campagne La puissance des mots au début de février. Très percutante, cette dernière a été conçue pour ne laisser personne indifférent!

« Le but de la campagne, c’est de montrer la portée des mots, parce que des mots, ça peut être vraiment blessant », explique d’entrée de jeu Gabrielle Landry, présidente de l’AGEB et l’une des instigatrices du projet.

« Notre génération en est une qui se sert beaucoup des réseaux sociaux et ça arrive régulièrement que les gens écrivent tout ce qui leur passe par la tête sans réfléchir, poursuit-elle. Ils utilisent malheureusement trop souvent des expressions inappropriées et dégradantes, comme fif, pute, etc. Quand on les questionne sur ce qu’ils veulent vraiment dire, la plupart du temps, ils nous disent que les mots qu’ils ont utilisés ne traduisent pas tout à fait leur pensée. Mais parce que c’est devenu normal d’utiliser des expressions dégradantes, bien ils le font. Avec notre campagne, on veut sensibiliser les gens au fait que leurs mots peuvent être beaucoup plus blessants qu’ils ne le pensent. »

Pour y parvenir, les membres de l’AGEB ont fait appel à six étudiants du Collège et leur ont demandé de jouer les mannequins pour la cause. Vêtus de chandails blancs, ces derniers se sont fait photographier alors qu’un mot était projeté sur leur poitrine.

« On projetait des mots comme pute ou lingling sur les chandails et on les prenait en photo, raconte Gabrielle. Ces mots-là ont été choisis parce qu’ils sont associés à un type de discrimination dont on est souvent témoin, comme le sexisme ou le racisme. Ensuite, on a utilisé ces photos pour faire les affiches de la campagne. Pour chaque image, on a choisi des slogans différents qui dénoncent l’utilisation d’expressions dégradantes. »

Par exemple, sur une des affiches de l’AGEB, on peut voir la photographie d’un jeune homme d’origine asiatique portant un chandail sur lequel il est écrit « Lingling ». Sous celle-ci figure le slogan « Je ne suis pas une ethnie ».

Exposées dans la grande salle du Collège pendant quelques jours, ces affiches ont beaucoup fait jaser. « On voulait que les étudiants parlent de la campagne, qu’ils ouvrent la discussion. Beaucoup de gens nous en ont parlé. Ça a fait réagir. C’est un premier pas dans la bonne direction », indique Gabrielle.

Signe que la campagne est un succès, M. Dave Anctil, qui enseigne la philosophie au Collège, compte utiliser les images de l’AGEB pour stimuler la discussion en classe.

« J’enseigne le marketing éthique dans un de mes cours intitulé Pouvoir de la parole. Dans le cadre de ce cours, mes étudiants sont amenés à développer des concepts de marketing éthique pour influencer les mentalités, croyances, etc. à propos d’enjeux de justice sociale. (…) J’aimerais utiliser les affiches pour les montrer à mes étudiants en classe, cela à titre d’exemples très réussis de marketing éthique », confie-t-il.

Les affiches seront exposées de façon permanente dans la grande salle près de la toile réalisée par le comité LGBT de Brébeuf en 2015. Cette toile avait alors été créée pour promouvoir la lutte contre l’homophobie. Il est tout naturel que les œuvres de ces campagnes soient exposées ensemble, marquant ainsi l’importance de transmettre et de développer, d’une génération à l’autre, les valeurs véhiculées par leurs messages (tolérance, acceptation, ouverture…) Également, l’AGEB publiera sous peu les images percutantes de sa campagne sur sa page Facebook et son compte Instagram.